Dans l’univers de la peinture artistique, chaque pinceau a sa fonction et ses usages spécifiques. Parmi eux, le spalter occupe une place à part. Peu connu du grand public, il est pourtant un outil de choix pour de nombreux artistes professionnels et artisans d’art.
Que vous soyez peintre muraliste, décorateur, ou artiste plasticien, comprendre les atouts du spalter vous permettra d’élargir vos techniques et de travailler avec davantage de finesse.
Observation fréquente : le mauvais outil pour le bon geste
Lorsque j’échange avec certains artistes que j’accompagne, je remarque parfois qu’ils réalisent leurs fonds ou aplats avec des petits pinceaux ronds ou plats étroits. Or, ces outils ne sont pas adaptés.
Ces pinceaux créent des traces disgracieuses, des démarcations visibles ou un résultat inégal sur de grandes surfaces.
Même sur de grandes surfaces, un spalter bien choisi et bien entretenu permet d’obtenir un aplat fluide et régulier, sans marques visibles ou, au contraire, on peut jouer volontairement avec des effets de stries, proches d’un léger embossage dans la matière.
Les spalters d’Amylee soigneusement rangées dans des boîtes dédiées
BON A SAVOIR
Dans le contexte de la peinture, on parle d’effet d’embossage lorsque des stries ou des textures apparaissent en relief subtil, comme si la matière avait été poussée ou marquée. Ce n’est pas un embossage “technique” comme en imprimerie, mais un effet visuel et tactile, souvent produit par l’outil (pinceau, couteau, spalter) qui laisse des traces dans la peinture.
Par exemple : Quand le spalter laisse de fines lignes parallèles visibles dans un aplat encore frais. Ou quand la matière est tirée d’une façon qui sculpte la lumière à la surface, comme chez Pierre Soulages, qui joue avec les effets de lumière sur les reliefs de sa peinture noire (outrenoir).
Quelles sont les caractéristiques du pinceau spalter ?
Le spalter est un pinceau large, plat et rectangulaire, doté de poils plus ou moins courts et selon besoins plus ou moins rigides (en soies naturelles, synthétiques ou un mélange des deux). Il mesure généralement entre 20 mm et 200 mm de large, avec une virole plate et un manche court ou long, selon les usages.
Types de poils :
- Soies naturelles (souvent en porc, poils de poney) : robustes, idéales pour les peintures épaisses, les empâtements et réalisations pleines de matières ou à base de solvants.
- Fibres synthétiques : plus souples, résistantes à l’eau, parfaites pour les médiums acryliques ou les vernis à base d’eau.
- Mixte : combine les avantages des deux types.
Spalters de toutes les tailles – Photo Amylee
Pour quelles raisons utiliser un spalter ?
- Application homogène de peinture sur de grandes surfaces.
- Glacis et lavis en peinture à l’huile ou à l’acrylique.
- Estompe des traces de pinceaux (effet lissé, dégradé ou fondu).
- Pour créer des lignes marquées (effets vague, etc)
- Pose de vernis ou de mediums sans laisser de traces.
- En décoration murale : faux-bois, patines, effets de matières.
C’est un pinceau de finition, souvent utilisé après d’autres outils pour unifier la texture ou créer des effets subtils.
Comment choisir un pinceau spalter ?
Voici les critères à prendre en compte :
- Largeur : Plus le support est grand, plus le pinceau peut être large (100–150 mm pour les murs, 30–60 mm pour les toiles).
- Souplesse des poils : Préférez des poils souples pour les glacis, rigides pour l’acrylique épaisse ou les effets décoratifs.
- Qualité de fabrication : Optez pour une virole bien fixée, sans perte de poils, et un manche ergonomique.
- Usage prévu : Certains spalters sont spécifiquement conçus pour les vernis, d’autres pour la peinture murale ou l’huile.
Le bonjour de Mr Spalter – Photo Amylee
Quand utiliser un spalter ?
- En début en fin de travail pour lisser une couche picturale.
- Pour vernir une œuvre sans trace visible.
- Pour créer des fondus ou dégradés atmosphériques.
- Pour des techniques mixtes sur toile ou bois.
- En peinture décorative pour des patines, effets nuageux ou faux finis.
Mes spalters favoris à l’atelier
Avec l’expérience, certains spalters se démarquent par leur qualité de fabrication et le plaisir de manipulation qu’ils offrent. J’ai une préférence pour ceux qui allient un bon toucher, une excellente nervosité (juste ce qu’il faut de souplesse et de tension), et une virole solide en acier inoxydable, résistante à la corrosion même après de nombreux nettoyages.
Parmi mes favoris :
- Les spalters Daler Rowney : fiables, bien équilibrés, super pour les travaux en finesse ou les glacis.
- Les spalters I Love Art : très bon rapport qualité/prix, adaptés aux artistes qui travaillent souvent en grands formats.
- Les spalters en nylon à tête blanche (qu’on retrouve notamment chez Pébéo ou Liquitex). Je les apprécie pour appliquer des apprêts, des sous-couches ou des couches de vernis. Leur rigidité contrôlée permet une application uniforme sans surcharge, et leur matière synthétique se nettoie très facilement.
Ces modèles de pinceaux spalters m’accompagnent dans la plupart de mes travaux préparatoires ou de finition. Ils sont devenus très utiles à l’atelier, que ce soit pour le travail sur toile, panneau de bois ou carton entoilé. Quand on n’a testé au spalter, on ne peut plus s’en passer !
Du matériel à retrouver chez Le Géant Des Beaux-Arts, magasins en France et boutique en ligne.
Dans l’atelier d’Amylee et sa collection de pinceaux Spalters
Où trouver un spalter et à quel prix ?
Le spalter est disponible :
- Dans les magasins d’art spécialisés comme Le Géant des Beaux-Arts
- Chez des fabricants comme Raphaël, Da Vinci, Léonard….
Prix indicatif :
- Entrée de gamme : 3–10 € (souvent en fibres synthétiques).
- Milieu de gamme : 10–25 €.
- Haut de gamme (fabrication artisanale ou poils naturels de qualité) : 30–70 €.
Comment utiliser un spalter ?
- Trempez légèrement le spalter, sans trop charger.
- Travaillez en mouvements longs, réguliers et parallèles.
- Pour les glacis, utilisez-le en touches douces ou en croisant les gestes pour éviter les lignes visibles.
- N’appuyez pas trop fort pour ne pas casser les poils ni marquer la peinture.
Spalters pinceaux – Photo Amylee
Nettoyage et entretien d’un pinceau spalter
Après chaque utilisation :
- Essuyez l’excédent de peinture ou de vernis sur les poils.
- Lavez à l’eau tiède savonneuse (peinture à l’eau) ou avec un solvant adapté (huile, vernis).
- Rincez abondamment jusqu’à ce que l’eau soit claire.
- Essorez sans tordre les poils.
- Reshapez les poils à la main pour qu’ils retrouvent leur forme plate.
- Laissez sécher à l’horizontale ou la tête en bas, jamais les poils vers le haut.
Astuces pour prendre soin de son spalter
- Évitez les lavages trop agressifs ou l’eau bouillante.
- Ne laissez jamais tremper les poils dans un pot, cela les déforme.
- Si les poils s’ouvrent avec le temps, un bain d’adoucissant ou de vinaigre blanc tiède peut aider à les redresser.
- Poncez légèrement la base du manche si le vernis commence à peler.
Défauts d’un spalter de mauvaise qualité
- Perte de poils : il perd ses poils facilement, ce qui les laisse collés sur le support ou dans le vernis.
- Poils trop rigides ou trop mous : difficile de doser la pression, ce qui crée des traces ou un résultat inégal.
- Mauvaise fixation du manche : la virole (partie métallique) bouge, ce qui rend l’outil instable.
- Mauvaise répartition des poils : l’application n’est pas uniforme, laisse des stries visibles.
- Poils qui s’écartent rapidement à l’usage, surtout après quelques nettoyages.
Spalters pinceaux – Photo Amylee
Défauts d’un spalter trop vieux ou mal entretenu
- Poils collés, durs : des résidus de peinture ou de vernis mal nettoyés rendent l’outil inutilisable.
- Déformation : s’il a mal séché ou été mal stocké (poils écrasés), il devient irrégulier.
- Poils fourchus ou usés : application moins précise, bords flous.
- Odeur désagréable : s’il a été laissé humide, des moisissures peuvent se développer.
- Manche fissuré ou fendillé : inconfortable ou risqué à manipuler.
BON A SAVOIR
Un bon spalter est souple mais tonique, ne perd pas ses poils, et a une virole bien fixée. Pour le faire durer : Nettoyage soigneux après chaque usage – Séchage tête en bas ou à plat – Stockage sans contact prolongé des poils avec une surface.
Entreposage en atelier : éviter la poussière
- Rangez vos spalters dans une boîte fermée ou un étui à pinceaux à enrouler.
- Sinon, suspendez-les la tête en bas, protégés par une housse respirante (un filet ou du tissu fin).
- Ne les laissez jamais à l’air libre : la poussière s’accroche très facilement aux poils, surtout s’ils conservent des résidus gras.
Le spalter est bien plus qu’un pinceau large : c’est un outil de finesse, de contrôle et de texture.
Il permet de sublimer un travail pictural, de vernir sans trace, ou d’apporter un effet atmosphérique fluide.
Polyvalent, économique et durable s’il est bien entretenu, le spalter est un allié fidèle de l’artiste à l’atelier.